J’ai mal vécu ce week-end de tension. Mes antennes d’historien me disant rien de bon et l’inactivité m’ont poussé à me ruer quart d’heure par quart d’heure sur tout média qui bouge au sujet de l’Ukraine. Je n’aime pas la mécanique poutinienne, je ne l’aime pas du tout, elle ne correspond en rien à ce que l’on peut attendre d’un dirigeant du XXIe siècle. Pourquoi cette partie de l’Europe est-elle encore dans l’alternance de guerres et de paix ?
Quelle est la situation : En Russie, un dirigeant vieillissant, qui a de plus en plus de mal à justifier son pouvoir sur une classe moyenne éduquée, au fait des exigences démocratiques et ne supportant plus la corruption. Ce digne héritier du KGB, offre une image virile et justifie son emprise autoritaire par la nécessité de restauration de l’état russe, plombé par la quasi-anarchie découlant de l’éclatement de l’URSS. Ce discours recycle tous les éléments de la fierté russe sans trop regarder d’où cela vient, dicature communiste, armée rouge, tsarisme, orthodoxie, panslavisme et chantage économique d’un pays riche en hydrocarbures sont exacerbés. Bref, on retrouve les ficelles d’un nationalisme … en difficulté, contraint d’aller de l’avant, sans se priver de faire jouer les armes. .
Quel est le terrain : Une mosaïque minée d’interdépendances, de mélanges, d’histoires communes et antagonistes où le joug russe, à marée basse, laisse, de la Baltique au Pont Euxin, des milliers de russes, autant de pied-rouges potentiels prêts à s’embraser au moindre boutefeu. En regardant la carte, on voit des fortes minorités russes dans les pays Baltes, qu’il a fallu rassurer par un statut garanti par l’UE, dans l’enclave de Kaliningrad-Königsberg … avec un passeport particulier maintenant la fiction d’une continuité territoriale avec Moscou, une situation plus trouble encore en pleine Moldavie, une vallée industrielle, la Transnistrie, mince ruban coincé entre le Dniestr et l’Ukraine, où sont localisées les principales industries du pays et où la XVIe armée de la fédération de Russie s’est autoproclamée protectrice des lieux… avec le soutien effectif de la Russie. Cette carte de l’Europe orientale est un jeu de go, avec un avantage net aux russes, où le Tsar Poutine, sur un point ou un autre du plateau, peut accentuer son effort et gagner de l’influence voire du terrain afin d’affirmer sa puissance sur la région, voire de reconstituer l’empire soviétique.
Sur ce point, nos histoires nous ont appris deux manières de sortir de ce cycle…L’une n’est que brutale, par des transferts de population forcés, comme en 1945, plus un seul allemand dans les montagnes de Bohême, en Poméranie… ou comme l’ont planifiés les dirigeants de l’ex-Yougoslavie par l’épuration ethnique… Vous devinez que je n’apprécie pas le procédé. L’autre… par la diplomatie. On parle français en Italie, le Val d’Aoste, en Suisse, au Luxembourg et en Belgique. Il ne viendrait pas à l’idée de quelque homme politique raisonnable dans l’hexagone, de marteler que la France a le devoir de protéger les populations francophones… de l’autre côté des frontière, d’y préconiser l’intervantion des nos troupes. De Gaulle fut « limite » avec le « vive le Quebec libre », mais sans qu’aucun véritable militaire vienne soutenir le propos. Même le front National ne le dit pas, non pas parce qu’ils ne le pensent pas, c’est viscéralement nationaliste, c’est dans leurs tripes… mais que ce n’est pas du tout habile électoralement. Même chose pour La RFA, même chose pour la Suède vis-à-vis de la Finlande… et même chose désormais dans les Balkans où cette règle de souveraineté et de respect des langues minoritaires s’impose raisonnablement. Ne croyons pas que nous sommes vaccinés… Les dirigeants actuels de la Hongrie n’ont de cesse de se plaindre de la portion congrue donnée au territoire hongrois depuis 1919, s’ils n’osent réclamer officiellement c’est qu’ils sont contraints par le cadre européen, et qu’ils y ont trop à perdre de ne pas le respecter.
Dans ce tableau, pour Vlad, l’occident est un ennemi insidieux, qui introduit moulte perversions : l’Etat de droit, principe contraire à l’arbitraire et la corruption, la liberté d’opinion et d’expression, au goulag les Pussy Riot, voire, crime contre les valeurs viriles et le torse glabre de vlad’, une permissivité intolérable sur l’homosexualité.
Cet occident s’immisce… bel ennemi intérieur et extérieur, beau bouc émissaire pour tout nationaliste. Bel exemple à suivre toutefois. L’Union Européenne, même avec tous ces disfonctionnements actuels est le meilleur rempart contre des démons qui ne font que sommeiller chez nous.